Découvrez en quoi consiste le travail de Kanak, chien de soutien émotionnel
Publié Octobre 30, 2018.
L’Académie Mondou
Spécialiste de la formation des employés Mondou
Pour un enfant victime d’acte criminel, passer une entrevue avec un enquêteur au poste de police n’est pas chose facile. Voyez comment Kanak arrive à faciliter ces moments difficiles.
Comment Kanak arrive-t-il à détendre les victimes?
En fait, nous demandons à Kanak de ne rien faire. Il doit rester couché près de la victime et déposer sa tête sur sa cuisse pour qu’elle puisse le câliner aisément. C’est la présence de Kanak, son tempérament calme, sa chaleur, sa douceur et son regard qui réconfortent la victime. Il ne fait rien, mais cela fait toute la différence. Que ce soit lors d’une entrevue entre un enquêteur et une victime, d’une rencontre chez le procureur de la Couronne ou d’un témoignage à la cour, Kanak reste immobile, auprès de la victime.
A-t-il reçu une formation?
Il a passé un an en famille d’accueil avant de passer les tests de classement à la Fondation Mira. Puis, il a suivi une formation de base d’environ trois mois afin de bien maîtriser les commandes de base. Lorsque nous l’avons accueilli au poste de police, nous avons fait plusieurs simulations d’entrevue avec mes enfants pour lui montrer comment se coucher à leurs côtés et poser sa tête sur leur jambe. Il a vite compris quel était son travail. Dans ce rôle, le tempérament du chien compte beaucoup plus que l’entraînement reçu.
Dans quelles circonstances a-t-on recours au soutien émotionnel de Kanak?
Toute personne victime ou témoin d’un acte criminel peut avoir recours au service de Kanak. La grande majorité est composée d’enfants agressés physiquement ou sexuellement.
Le chien peut aussi accompagner les policiers communautaires lors de visites dans les écoles, les résidences pour personnes âgées, les centres jeunesse, les hébergements pour femmes victimes de violence. Cela facilite la communication et le rapprochement, et aide à faire passer les divers messages de prévention plus aisément. La plupart des gens aiment les chiens et leur présence fait tomber les barrières, dont celle de l’uniforme.
Par exemple, Kanak a participé à des rencontres de rapprochement auprès de jeunes détenus et de jeunes fugueuses. Il a été notre porte d’entrée auprès de ces groupes qui ne sont généralement pas favorables à la présence de la police et nous avons pu leur décrire le précieux rôle de Kanak au sein du Service de police de la Ville de Sherbrooke. Sa présence a capté leur attention, détendu l’atmosphère et rendu ces rencontres conviviales. Nous avons pu communiquer plus aisément nos messages de prévention, comme sensibiliser les fugueuses aux stratégies de recrutement des proxénètes.
Pourquoi porte-t-il une veste?
Premièrement, sa veste remplace le harnais de travail habituel de la Fondation Mira. Quand il la porte, il sait qu’il est au travail et doit alors bien se comporter, quoiqu’il soit bien discipliné la majorité du temps. La deuxième raison est qu’elle sert d’identification. Lorsque nous devons nous rendre au palais de justice, à l’hôpital ou à tout autre endroit, les gens comprennent que c’est un chien policier et un chien Mira grâce aux écussons brodés sur sa veste.
Comment Kanak intervient-il?
Lorsque l’enquêteur communique pour la première fois par téléphone avec la victime ou sa famille et qu’il voit que la personne est anxieuse, stressée ou hésitante, il propose le soutien de Kanak. Nous n’imposons jamais la présence du chien. Nous devons aussi vérifier si la personne craint les chiens, est allergique ou n’a tout simplement pas d’intérêt.
Lors de la première rencontre, je présente le chien à la victime et à sa famille. Je lui parle de son rôle, de la Fondation Mira, de la raison d’être de sa veste, des bienfaits qu’il peut apporter et de la façon dont l’entrevue se déroulera. D’autre part, s’il s’agit d’un enfant qui connaît l’émission Pat’patrouille, je lui dis que c’est un vrai Pat’patrouille, comme Chase.
J’essaie de répondre à toutes les questions relatives au chien, afin d’éviter qu’elles ne soient posées en entrevue. Lorsque je présente Kanak à l’enfant, je l’avise que durant la rencontre avec l’enquêteur, il est possible qu’à force de se faire câliner, Kanak s’endorme et se mette à rêver, à ronfler ou à péter. L’enfant rigole et cela détend l’atmosphère.
Comment Kanak aide-t-il les gens à surmonter une épreuve?
Par sa simple présence, il apaise la victime et la sécurise. Il aide à briser la glace et à créer un lien de confiance entre les intervenants judiciaires et la victime. Ainsi, lorsqu’un parent annonce à son enfant qu’il devra rencontrer l’enquêteur ou le procureur et qu’il devra expliquer ce qui est arrivé, l’enfant se sent contrarié. Si son parent lui dit toutefois qu’un chien l’accompagnera à toutes les rencontres, cela motive l’enfant. Il pense au chien au lieu d’anticiper la rencontre.
Kanak optimise l’intervention policière, car il ajoute un élément positif à un événement traumatisant. Il est comme un copain qui ne juge pas, ne critique pas et qui offre toute son affection et son attention durant ces moments difficiles. En enlevant du stress à la victime, il lui est plus facile de se concentrer et d’expliquer de façon détaillée ce qui s’est produit.
Avec l’expérience, j’ai découvert que la présence de Kanak lors d’un témoignage en cour donne à l’enfant le courage d’affronter son agresseur, l’aide à gérer ses émotions et à témoigner devant le tribunal. Au final, la victime est fière d’elle et peut amorcer un processus de reconstruction personnelle.
Racontez-nous situation où Kanak a soutenu une personne dans le besoin
Des collègues avaient une entrevue urgente à faire avec une jeune victime d’agression sexuelle, à la suite d’un signalement fait par une tierce partie à la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ). L’adolescente semblait avoir un trouble du spectre de l’autisme. Elle ne répondait à aucune question sinon par un oui ou un non inaudible et fuyait du regard de l’enquêteur et de l’intervenante de la DPJ. Lorsqu’ils lui ont proposé la présence de Kanak elle a commencé à interagir avec eux. Elle avait deux chiens chez elle et son visage s’est alors illuminé.
Dès que la jeune fille a rencontré Kanak, elle a commencé à se détendre. Tout au long de l’entrevue, la jeune fille a câliné Kanak qui semblait l’apaiser et lui apporter un réel réconfort. Il a permis de faire tomber la gêne qui l’empêchait de s’ouvrir. L’approche délicate de l’enquêtrice et sa grande patience conjuguées à la présence de Kanak ont permis de recueillir le témoignage de la jeune fille concernant toutes les agressions sexuelles qu’elle avait subies.
Kanak n’avait alors que quelques mois d’expérience de travail et il a grandement impressionné mes collègues. Durant les trois heures qu’il a passé auprès de la jeune victime, il a eu un comportement exemplaire, a été calme et n’a pas bougé. L’intervenante de la DPJ en était à sa première expérience avec un chien de soutien et n’a eu que de bons mots après l’entrevue.
L’agresseur a par la suite plaidé coupable aux accusations. Sans le témoignage de la victime, il n’aurait jamais été accusé. On a donc pu démontrer la pertinence de la présence d’un chien de soutien dans ce genre de cas, car Kanak a fait un travail exceptionnel.
Entrevue avec Mélanie Bédard,
sergente-détective du service de police de Sherbrooke.
Interview with Mélanie Bédard,
detective from du Sherbrooke Police.